Le temps de prendre la route du retour au pays est venu. Cette route part donc de Salamanque. Cela commence le mercredi 29 mai pour se terminer le samedi 1ᵉʳ juin 2024 après trois étapes et quatre jours de voyage. Je ne m'attendais pas à de si belles découvertes pour ces derniers trajets en Espagne.
La distance à vol d’oiseau entre Salamanque et Toulouse est de 648 kilomètres. Le trajet le plus direct et le plus rapide fait 770 kilomètres. Le mien fait environ 1100 kilomètres.
Itinéraires depuis le début du voyage :
Ce mercredi 29 mai, je pars donc de Salamanque. Je m'attends à des trajets un brin pénibles, car il s'agit d'étapes de liaison, principalement. En tout cas, pour cette première étape du trajet retour, j'ai prévu quelques petites routes pour rejoindre Zamora et sa province. Vers 10h30, j'aperçois une ville perchée sur ma droite. Je m'y arrête pour un café et découvre la jolie ville de Toro.
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Le Douro depuis le balcon de Toro |
Toro est une ville située une tour de guet naturelle. De tous les temps anciens, elle fut un lieu stratégique de la ligne de défense du Duero entre chrétiens et musulmans. La collégiale en est le monument majeur, mais il y en a bien d'autres. Je prends le temps de flâner autour du bâtiment et de découvrir le balcon sur le fleuve Douro, qui coule en bas. Ensuite, j'entre dans l'édifice, mais là aussi, comme à Salamanque, une obole est nécessaire pour en faire le tour. C'est dommage. Je ne sais pas si cette manière de faire est spécifique à la Castille-y-Leon. Je n'avais jamais constaté cela précédemment dans mes voyages espagnols.
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Collégiale de Santa-Maria-la-Mayor - vue face côté bistrot |
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Collégiale de Santa-Maria-la-Mayor - vue pile côté balcon sur le Douro |
Cette ville de Toro marque l'arrêt des routes que j'apprécie. Celles où on ne peut pas rouler vite. Celles où on peut se perdre. Celles qui possèdent des virages qui font qu'on en a le tournis. Ce n'est pas encore l'autovia, mais cela ne va pas tarder. La route est de plus en plus rectiligne.
L'autovia, justement, commence à Tordesillas où je prends la direction de Valladolid. J'y entre d'ailleurs, tellement je suis déprimé de rouler sur ce ruban autoroutier. Mais, comme à Caceres (voir épisode 2 de ce voyage en Estrémadure), impossible de m'approcher du centre historique, sans laisser la moto. Par ailleurs, ce que j'en vois ne m'inspire pas énormément. Me revoilà sur l'autovia, cette fois jusqu'à Palencia...
J'essaye de voir à quoi ressemble la ville, mais cet essai n'est, là aussi, pas concluant. Ouf! Je revis à partir de Quintana-Del-Puente. Je quitte l'autovia pour la N622. Cela reste rectiligne, mais au moins, il y a des champs de coquelicots magnifiques.
Un peu plus loin, juste après Santillan del Agua et la BU904, les paysages changent, la route également. Tout cela devient nettement plus agréable. L'heure du déjeuner approche. J'avise un espace approprié à la préparation de mon repas, lorsque j'arrive à Puentedura sur les rives du rio Arlanza. L'abondance de pollen ne me fait pas éternuer.
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Puentedura - Rio Arlanza |
Il est 14h00 et je peux prendre mon temps. Je ne dois pas arriver avant 16h00 à mon étape, afin d'éviter le moment du coup de feu, au restaurant entre 14h00 et 16h00. L'hôtelier me l'a bien précisé. Je me fais mon poulet basquaise, tranquille donc, car il me reste assez peu de kilomètres à faire. J'en profite même pour faire une sieste.
Après être reparti, j'arrive très vite au village de Corravubias. Je découvre un village incroyablement charmant.
Covarrubias doit son nom aux grottes rougeâtres des environs. L'urbanisme du village est typiquement castillan avec ses rues à portiques et ses maisons à colombages. J'entre dans la vieille ville par l'arc des Archives de l'Avancement de la Castille, sur la façade de laquelle on peut voir le bouclier de Felipe II. Je me gare sur la plaza Dona Sancha, à l'ombre, car il fait chaud. Le thermomètre de la moto affiche 28 degrés. Je vire les gants, le casque, la veste, l'airbag, le foulard et laisse tout sur place pour aller faire un tour à pied. Je retire la clef de contact, tout de même... Mais je ne suis pas inquiet, comme à chaque fois que je suis dans un village espagnol.
C'est vraiment très joli. Il est 15h15 environ. Les gens sont en train de déjeuner chez eux ou dans les restaurants du village. Il y a bien quelques touristes, mais l'ensemble semble assez désert. J'en profite pour faire quelques photos, sans avoir les passants.
Je repars sur la BU901 et un superbe panorama s'ouvre devant moi. Je suis à une altitude de 1078 mètres comme l'annonce le panneau indicateur « Alto Pena Alta 1078 mètres ».
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Pena Alta |
J'arrive à mon étape du soir quelques minutes plus tard. Il est 15h45. C'est le village et le monastère de Santo-Domingo-de-Silos. Je loge, ce soir, dans l'auberge du même nom.
Le temps de m'installer et de prendre une douche, je pars en visite. Au cœur des montagnes de Castille, l’abbaye Saint-Dominique de Silos se dresse majestueusement, telle une sentinelle du temps. Fondée au Xe siècle, elle incarne la fusion harmonieuse entre l’architecture romane et néoclassique, un dialogue entre les époques qui résonne encore aujourd’hui.
L’architecture de l’abbaye raconte son histoire. Les bâtiments romans, solides et intemporels, se mêlent aux lignes néoclassiques tracées par l’architecte Ventura Rodríguez au XVIIIe siècle. Le cloître roman, préservé avec amour, côtoie l’église néoclassique. Aujourd’hui, l’abbaye est un témoin vivant de ces deux époques, un livre ouvert sur les pages du passé et du présent.
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Santo-Domingo-de-Silos |
Dans la vallée pittoresque du Tabladillo, l’abbaye a vu naître la vie monastique au IXe siècle. Des granges monastiques ont abrité les premiers pas de cette renaissance spirituelle, au moment où la reconquête castillane battait son plein. Puis, au Xe siècle, les parchemins évoquent un monastère dédié à Saint-Sébastien de Silos. C’est là que le moine émilien, Dominique, entre en scène. En 1041, le roi Ferdinand de Castille mentionne ce visionnaire, cet abbé qui insuffla une nouvelle vie à l’endroit, lui donnant un nouvel essor. Dominique de Silos, considéré comme thaumaturge, sera canonisé en 1076, et l’abbaye deviendra un lieu de pèlerinage, un phare spirituel dans la brume du temps.
L’architecture de l’abbaye raconte son histoire. Les bâtiments romans, solides et intemporels, se mêlent aux lignes néoclassiques tracées par l’architecte Ventura Rodríguez au XVIIIe siècle. Le cloître roman, préservé avec amour, côtoie l’église néoclassique. Aujourd’hui, l’abbaye est un témoin vivant de ces deux époques, un livre ouvert sur les pages du passé et du présent.
Et puis, il y a ce cyprès. Planté par les moines à leur arrivée, il s’élève fièrement dans le cloître, symbole de la renaissance de Silos. Gerardo Diego, le poète, a composé un sonnet en son honneur, un chant à la fois mélancolique et vibrant. « El ciprés de Silos », murmure-t-il, et le vent emporte ses mots à travers les siècles. Aujourd’hui, l’abbaye Saint-Dominique de Silos continue de vibrer au rythme des chants grégoriens. Elle est un refuge pour les âmes en quête de silence et de beauté.
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Cloître de l'abbaye |
L'auberge, où je loge, est toute simple. Le nombre d'étoiles affichées sur l'enseigne est pourtant de trois, mais j'ai des doutes... Le prix de ma nuit est du même montant que le prix des trois jours de parking à Salamanque... En comptant le petit-déjeuner qui est inclus à la nuitée. La chambre est plutôt moyenne avec des peintures qui s'écaillent dans la salle de bains. Il y a, toutefois, le flacon de gel douche et shampoo à disposition... L'auberge est typiquement espagnole, donc c'est plutôt de la cuisine moyenne. Je m'y attendais. De toute façon, je ne reste qu'une nuit.
Le lendemain, jeudi 30 mai, je suis prêt à partir à 8h30. J'ai une étape assez longue aujourd'hui. Si la météo est bonne, j'ai prévu de rejoindre Mauléon-Licharre par de toutes petites routes. Dans ce cas, l'étape fera 420 kilomètres. Pas sûr que le dieu du Soleil me suive aujourd'hui. Les prévisions ne sont pas bonnes pour Pampelune et la France. De toute façon, j'ai remis la mentonnière du casque et ressortis les gants de mi-saison, car à mille mètres d'altitude, le matin, il fait frais.
La route, incroyable dès le départ, passe dans les gorges du Mataviejas. Ensuite, je rejoins la BU825 rectiligne, mais dans un environnement plutôt charmeur.
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La dite BU825 |
Un peu plus tard, je rejoins la LR113. C'est le même numéro de route que celle prise à l'aller, en quittant Logrono (voir épisode 1 de ce voyage en Estrémadure). En fait, c'est son complément un peu plus au nord. C'est la partie qui permet de revenir à Logrono en faisant une belle boucle, si on cumule les deux. Là aussi, elle est complétement défoncée, mais l'environnement est magique.
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Embalse de Mansilla |
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Puerto de Pena hincada à 1412 m |
Je roule ainsi jusqu'à Ortigosa-de-Cameros. Là, je retrouve la nationale conduisant à Logrono. A présent, fini de rigoler, je fais du kilomètre pour avancer et me rapprocher de la France. Je m'installe sur l'A12, fait mon dernier plein d'essence à 1,70 € (c'était plutôt 1,54 €, précédemment) et mets le régulateur à 120 km/h. C'est parti pour quelques heures... Jusqu'à la route du col de Roncevalle et d'Arneguy me ramenant dans mon pays.
Le lendemain, vendredi 31 mai, est un jour où je repose mes bras, par rapport à la moto, mais c'est aussi mon sas, avant le retour à la vie réelle. Je pars pour quelques heures découvrir la ville et ses environs par une randonnée sur les hauteurs des crêtes, dont celle du Matalon.
Le fromage Etorki, fierté locale, se dévoile aussi sur les étals des marchés. Sa saveur douce et crémeuse évoque les pâturages verdoyants où paissent les brebis ou les vaches, je ne sais plus. Les montagnes alentour veillent, leurs sommets effleurant les nuages. Le Saison, rivière serpentant la ville, murmure des secrets anciens, tandis que le gave d’Oloron accueille ses eaux avec bienveillance.
Après les trois premiers kilomètres, la sente s'enfonce dans la forêt. Le parcours n'est pas entretenu, ou cela n'a pas été encore fait. Les pluies, récentes sans doute, rendent le sentier glissant. Il y a de nombreux arbres tombés en travers du chemin. Je dois gravir les abords, pentus, pour les passer. Je glisse. Avec mon doigt pansé, c'est un peu galère pour se tenir et ne pas se vautrer, comme un sac de farine ou d'autres choses. Pourquoi est-ce que je pense à de la farine, en cet instant ? La pente se fait plus forte. C'est un peu trop pour moi. Je fais donc plus de pause afin de retrouver mon souffle. Heureusement, le sentier s'élargit jusqu'à s'ouvrir sur la vallée.
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Ortigosa de Cameros |
Comme annoncé ce matin, la météorologie est pourrie. Il pleut et il fait froid. Je renonce à prendre la D128 conduisant à la vierge d'Orisson. Le ciel est complètement bouché par là. Je rejoins Saint-Jean-Pied-de-Port pour ensuite aller à Mendive et Béhorléguy. Car tout de même, je veux finir cette étape pour des routes de montagne.
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Sur les hauteurs de Mendive |
Je m'arrête admirer le panorama, un peu bouché sur Mendive, mais tout de même très joli. Et c'est là que j'ai un problème de petit doigt. Problème qui va, certainement, m'embêter un bout de temps, je crois. Je suis en train de prendre la photo ci-dessus, quand j'entends un bruit de ferraille qui glisse. Un bruit que je reconnais entre tous. La moto qui se fait la malle, quand tu es dans une pente forte, en glissant sur la béquille latérale... Mince alors, je croyais bien avoir enclenché la première.
J'arrive à temps, mais la moto bascule tout de même, côté droit. Je la retiens pour amortir le choc et je ne sais pas comment j'ai fait, mais je me retrouve avec le petit doigt, gauche, en sang. Une aspérité quelque part ? Un pincement ? Je ne sais... Je remets tout en ordre. Enfin, à peu près pour le doigt... Faut juste que j'arrive à enfiler mon gant, et que cela ne gonfle pas trop avec le sang qui pisse, pas mal... Il faut aussi que je trouve une pharmacie, car mon stock de pansements vient d'y passer.
Je mets l'adresse de Mauléon-Licharre dans mon GPS, une route la plus directe et la plus rapide, sans faire le touriste, cette fois. J'y arrive vers 16h00. J'attrape le premier type qui passe et lui demande où se trouve une pharmacie. J'y trouve porte close... C'est jour de grève, à priori c'est comme cela partout en France. Bon!! Je toque au guichet des ordonnances urgentes et défends ma cause. La pharmacienne finit par céder et me vend le nécessaire du grand blessé, stéristrips, dioseptine, gazes et sparadrap. Arrivé à l'hôtel, je m'installe assez vite avant de passer aux soins. Une fois cela fait, je peux me poser et observer mon nouvel environnement, pour les deux jours à venir. .
Mauléon-Licharre, une perle nichée au cœur des collines, a un certain charme. Capitale de la Soule, cette commune du Pays Basque, située dans le département des Pyrénées-Atlantiques, résonne avec l’histoire médiévale. Ses origines remontent à une forteresse réputée imprenable, baptisée le « Lion Redoutable » (Mau / léon). Et justement, le château est juste en face, à la fenêtre de ma chambre.
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La forteresse de Mauléon-Licharre |
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Un peu plus près... |
Le lendemain, vendredi 31 mai, est un jour où je repose mes bras, par rapport à la moto, mais c'est aussi mon sas, avant le retour à la vie réelle. Je pars pour quelques heures découvrir la ville et ses environs par une randonnée sur les hauteurs des crêtes, dont celle du Matalon.
Le parcours de la randonnée est le suivant :
Au fil des ruelles pavées, les espadrilles, ces chaussures en toile, dansent au rythme des pas des habitants. Mauléon-Licharre est peut-être leur berceau, leur foyer. C'est comme si l’odeur du cuir et du lin flottait dans l’air, tissant un lien entre tradition et modernité. Les espadrilles, modestes et élégantes, portent en elles l’âme de cette terre basque.
Le fromage Etorki, fierté locale, se dévoile aussi sur les étals des marchés. Sa saveur douce et crémeuse évoque les pâturages verdoyants où paissent les brebis ou les vaches, je ne sais plus. Les montagnes alentour veillent, leurs sommets effleurant les nuages. Le Saison, rivière serpentant la ville, murmure des secrets anciens, tandis que le gave d’Oloron accueille ses eaux avec bienveillance.
Mauléon-Licharre, telle une toile de maître, mêle les couleurs de son histoire, les accents de sa langue basque, et les sourires, parfois, de ses habitants. Dans ses ruelles étroites, les souvenirs se croisent, les légendes s’épanouissent, et le temps s’étire, comme un fil d’espadrille tissé par les doigts habiles des artisans. Moi, de mon côté, je grimpe au château pour démarrer la randonnée.
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La forteresse de Mauléon-Licharre |
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Mauléon-Licharre |
Une fois en haut, la randonnée devient bien plus facile. Je suis de retour, à l'hôtel, en milieu d'après-midi. Une sieste là-dessus, et je suis prêt pour la dernière soirée de ce voyage.
Samedi 1er juin est mon dernier trajet. Je parcours ces derniers 270 kilomètres en repensant aux découvertes faites durant ce voyage de 3504 kilomètres sur deux semaines en Estrémadure. Je suis prêt pour reprendre une vie classique de sédentaire, jusqu'à la prochaine virée ou au prochain voyage.
Sources et crédits de cet article :
Le site du monastère de Santo Domingo de Silos : Abadia de silos.
Le site de la mairie de Mauléon-Licharre : Découvrir Mauléon-Licharre.
Le site de l'office de tourisme des Pyrénées-Atlantiques : Tourisme 64.

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