Mais que se passe-t-il à cette date ? Avec l’arrivée du printemps, les rivières du Tarn, de France, et de Navarre, s’animent d’une effervescence particulière. Le samedi 9 mars 2024, les pêcheurs se préparent pour un événement annuel très attendu : l’ouverture de la pêche à la truite. Cette date, fixée par le
législateur au deuxième samedi du mois de mars, marque le début d’une saison où la nature reprend ses droits et les cours d’eau s’éveillent au rythme des lancers.
La pêche à la truite dans le Tarn a une histoire riche, intimement liée aux rivières et aux paysages variés de la région. Le département du Tarn, nommé d'après la rivière qui le traverse, est réputé pour ses richesses piscicoles et offre une multitude de cours d'eau propices à la pêche sportive. Les rivières comme l'Agout et le Thoré, ainsi que leurs affluents, descendent des monts de Lacaune et de la Montagne Noire, formant un réseau de cours d'eau de première catégorie piscicole. Ces rivières sont particulièrement appréciées pour leurs populations de truites farios sauvages et offrent une diversité de parcours pour toutes les techniques de pêche.
La pisciculture a également joué un rôle important dans l'histoire de la pêche à la truite dans le Tarn. Par exemple, la pisciculture tarnaise de Brassac est une source majeure de truites pour les plans d'eau locaux et ceux des départements voisins, contribuant ainsi à la tradition de l'ouverture de la pêche à la truite chaque année. La pêche à la truite dans le Tarn est une tradition ancrée dans le patrimoine local, soutenue par une gestion attentive des ressources aquatiques et une passion transmise de génération en génération parmi les pêcheurs de la région.
Comme à l'accoutumée, je suis parti pour Bouyrols jeudi matin, pour deux jours de télétravail, avant le week-end. Vendredi 8 mars, vers le début de l'après-midi, ayant commencé très tôt, j'ai terminé mes heures. Je passe à la détente, dans l'attente fébrile du lendemain. Je pars pour une randonnée à côté de chez moi. Je dois, tout de même, me rendre au village de Montredon-Labessonié et poser la voiture sur le parking de l'église.
La Fédération du Tarn pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique, fondée en 1972, joue un rôle crucial dans la préservation de cet écosystème. Elle regroupe près de 17 000 pêcheurs et veille à la protection de l’environnement tout en promouvant la pratique de la pêche.
Pour cette ouverture 2024, les pêcheurs peuvent s’attendre à des moments de partage et de convivialité, mais aussi à la satisfaction de participer à une tradition qui se perpétue d’année en année. Que ce soit pour le plaisir de la capture ou simplement pour profiter de la tranquillité des lieux et se vider l'esprit de toutes les préoccupations quotidiennes...
Pour la première fois en vingt ans de pêche en Occitanie, je rencontre le garde-pêche et me fait contrôler. Après quelques minutes d’échanges, étant en règle avec l’autorité compétente…. Je repars dans la rivière et continue ma quête. Pour bien comprendre, vous devez savoir que la pêche de la truite fario, avec un lancer ultra-léger (technique que j’utilise en début de saison, avant de passer aux mouches), est une expérience qui mêle habilement observation, patience, tentative de précision et excitation. Imaginez-vous remonter une rivière à l’eau cristalline et tumultueuse, les rayons du soleil filtrant à travers les feuilles des arbres (quand elles seront présentes, car là, c’est encore prématuré), créant des jeux de lumière sur l’eau. Vous essayez de marcher en passant au-dessus des rochers, en posant le pied sur des sols instables, donc en essayant de ne pas vous étalez le cul dans l’eau, si ce n’est pas plus, parfois… Vous tenez votre canne, le cœur battant à l’idée de ce combat entre l’homme et la nature. Rien d’autre ne peut vous encombrer le cerveau.
La truite fario n’est pas qu’un simple poisson ; c’est une expérience culinaire qui éveille les émotions et célèbre la finesse de la nature. C’est un voyage sensoriel qui commence au bord de la rivière et se termine dans l’intimité d’une bouchée parfaite.
Lors d'une randonnée, l'été dernier, j'ai croisé un panneau indicateur qui m'a donné envie d'en savoir plus. Ce panneau annonçait « Le point de vue de Lagrifoull ». Il y a seulement quelques jours, ce souvenir surgit de ma mémoire. Pour ne pas le perdre, je m'active immédiatement et cherche sur le réseau Internet ce qui se cache derrière ce nom. En fait, ce point de vue de Lagriffoul est un belvédère situé sur le sentier de la randonnée de Lagriffoul, à Montredon-Labessonnié, dans le département du Tarn, donc!
Ce sentier, long de seize kilomètres, suit en partie le GR36. Il traverse des paysages variés de forêts, de prairies et de rochers. Il offre également une vue panoramique sur le village et la chaîne des Pyrénées par temps clair. Il passe aussi par la Croix de Capello, un monument historique datant du XVIIe siècle.
La fiche Sentier en France (voir dans les « sources et crédits » en bas de l'article) me précise que la durée de marche est d'environ quatre heures.
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Sortie de Montredon-Labessonié vers les ruines du château de la Baronie |
Je sors du village par la route conduisant à Réalmont. En ce moment, les routes de Montredon-Labessonié sont en travaux. Le bitume et les trottoirs sont inexistants… Fort heureusement, très vite, je bifurque dans la rue du chemin de Montreal, en bon état elle. Le bitume laisse place à l'herbe et à la terre, dès les dernières maisons passées. Ensuite, je monte vers les ruines du château de la Baronnie et chemine en forêt où s'en suit une longue descente.
Au sortir d'une forêt épaisse, le sentier débouche sur une prairie bordée d'un mur de bambous. Je passe au-dessus d'un ruisseau et, après quelques déboires, je m'extirpe de la végétation. Oui! Le chemin passe bien ici.
Sur ma gauche, je vois une maison. Tout semble clos. Sans doute une résidence secondaire. Sur ma droite, un joli petit étang. La carte m’apprend que je suis à « La Mouline ». Je débouche sur une toute petite route qui traverse une rivière tout à fait « pêchable »... C'est le « Rieu de l'Aze ». A faire un jour prochain... Je dois, d'abord, étudier la route me permettant d’accéder à ce lieu et vérifier si c'est bien une rivière de première catégorie.
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Le Rieu de l'Aze |
Je suis descendu à une altitude de deux cents et quelques mètres. Il me faut faire quelques efforts pour revenir aux six cents et quelques mètres d'altitude de Montredon-Labessonié. J'arrive au point de vue de Lagrifoull.
Par chance, le ciel est dégagé et j'aperçois effectivement le massif de la Montagne Noire et, derrière, celui des Pyrénées.
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Point de vue de Lagriffoul |
Le printemps est proche, les jonquilles commencent à sortir. Sur cette partie du sentier, les sous-bois se tapissent de jaune.
Depuis le départ, le sentier est très humide, voire boueux par endroits. Là, j'ai quasiment une piscine à traverser...
Parti à 14 h 00, j'arrive au bout du sentier à 17 h 15, soit 3 h 15 de marche, sans flâner.
Le lendemain, 9 mars, c'est l'ouverture de la pêche à la truite. Dès l’aube, une demi-heure avant le lever du soleil, les berges s’animent. Les pêcheurs, munis de leur permis de pêche, se positionnent dans leurs spots favoris, espérant capturer la truite tant convoitée. La réglementation est stricte : la maille et le quota varient selon les rivières, et il est essentiel de se renseigner auprès des Associations Agréées pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique (AAPPMA) ou des fédérations de pêche pour connaître les spécificités locales.
Itinéraire suivi :
Cette année, je me rends près de Saint-Jean-de-Jeanne pour pêcher à l'ultra-léger dans le Dadou. J'ai repéré ce lieu de pêche lors de cette balade à moto entre Combes et Puechs. Je mets 45 minutes pour parcourir les 20 kilomètres du trajet en voiture. La route est très sinueuse et très étroite.
Le Dadou est tumultueux en cette fin d'hiver et début du printemps. Le débit est puissant et, le remonter en pêchant, demande de la prudence.
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Le Dadou |
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La première Fario de l'année |
Avant même que le leurre ne touche l’eau, il y a un sentiment de calme et de concentration. Choisir le bon leurre, ajuster le poids, sentir le vent et observer le courant, chaque détail compte pour attirer la convoitée truite fario. Vous lancez le leurre, d’à peine quelques grammes, en essayant de ne pas le prendre dans la végétation environnante. Le mouvement est fluide, presque méditatif. Le fil se déroule dans l’air avant que le leurre ne plonge dans l’eau avec, à peine, une éclaboussure. Il tombe, juste là où vous vouliez qu’il soit ! Rien qu’avec cela, vous êtes envahis d’une certaine fierté. La légèreté de l’équipement permet une précision remarquable, et vous sentez chaque vibration, chaque tiraillement, comme si vous étiez en contact direct avec le fond de la rivière.
C’est là que le moment devient suspendu dans le temps, chaque seconde semble s’étirer. L’anticipation monte. Vos sens sont en alerte, à l’affût du moindre signe trahissant la présence de la truite. Soudain, une tirée! Votre cœur s’emballe, les mains se resserrent sur la canne. C’est un moment électrisant, où l’adrénaline se mêle à la joie pure. La lutte est délicate, il faut être à la fois ferme et précautionneux pour ne pas briser la ligne. Vous gérez le frein du moulinet, vous gérez l’inclinaison de la canne. Vous accompagnez les mouvements et les sauts de la truite. Après ces premiers instants, vous savez déjà si la truite est à la maille. Si le combat est rude, la truite fait certainement plus de 30 cm. Vous ne voulez pas casser. Voir la truite fario sortir de l’eau, c’est comme découvrir un trésor. Ses écailles scintillent, ses couleurs sont un chef-d’œuvre de la nature. La fierté de la capture se mêle au respect pour cette belle créature. La montée d’adrénaline s’arrête une fois le poisson dans l’épuisette. Ensuite, deux choix se posent. Soit relâcher le poisson, soit le garder pour une dégustation au repas à venir.
En cas de libération, le moment de relâcher la truite permet de la regarder nager loin, retourner à son monde aquatique, c’est un adieu doux-amer. La relâcher se fait tout en délicatesse, bien sûr. Elle s’échappe après une dernière caresse. Vous êtes reconnaissant pour le combat, pour l’émotion, et vous savez que vous reviendrez pour revivre cette danse entre l’homme, le poisson et la rivière. Chaque sortie de pêche est une histoire, un mélange de technique et de passion, un souvenir gravé dans le temps. La truite fario et le lancer ultra-léger ne sont pas seulement une pratique de pêche, c’est une poésie en mouvement, un art qui se vit pleinement. Ce plaisir est encore plus intense avec une canne à mouche, mais cela est une autre histoire...
En cas de dégustation, il faut aussi savoir que manger une truite Fario, sauvage, est une expérience culinaire qui éveille les sens et suscite une palette d’émotions raffinées. Cela n’a rien à voir avec la dégustation d’une truite d’élevage. Cela commence au moment de la cuisiner dans la poêle. La Fario sauvage se cabre systématiquement après les premières minutes de cuisson, comme si elle voulait continuer le combat, réflexe des chairs puissantes habituées à nager dans l’eau vive. Ensuite, imaginez la première bouchée : la chair tendre et délicate de la truite fond sur la langue, libérant des saveurs subtiles et complexes. Avant même de goûter, l’aspect visuel de la truite soigneusement préparée est un régal pour les yeux. Les nuances de rose et d’argent de la chair, agrémentées d’amendes effilées, promettent une expérience gustative aussi élégante que naturelle. En approchant le plat, les arômes délicats de la truite, accentués par une cuisson à l’huile d’olive, commencent à titiller les narines. C’est une invitation à plonger dans un monde de saveurs délicates. La première bouchée est un moment de révélation. La texture soyeuse de la truite, associée à la fraîcheur de sa saveur, crée un contraste saisissant avec le croquant des amandes effilées. Chaque saveur est un fil qui tisse une histoire dans votre palais. Manger une truite fario sauvage, c’est aussi apprécier la sensation de légèreté qu’elle procure. Contrairement à des mets plus lourds, la truite laisse une impression de satisfaction sans lourdeur, un plaisir qui ne pèse pas sur l’estomac, mais qui remplit l’âme.
La truite fario n’est pas qu’un simple poisson ; c’est une expérience culinaire qui éveille les émotions et célèbre la finesse de la nature. C’est un voyage sensoriel qui commence au bord de la rivière et se termine dans l’intimité d’une bouchée parfaite.
Pour cela, le respect s’impose et la nature doit être remerciée. Les prélèvements méritent des attentions toutes particulières. Cela commence à la touche afin de ne pas blesser le poisson, si on veut le relâcher, et, si on décide de la garder, se termine dans l’assiette dans le respect du plaisir procuré.
Le jour suivant, je me rends dans le Gijou. Son débit est encore plus puissant en cette fin d'hiver que le Dadou, hier. Le torrent rugit dans une petite brume dès potron-minet. La surprise, au départ de Bouyrols, aura été de devoir gratter le pare-brise, compte tenu du gel de la nuit... Pas sûr que les Dames fario soient de sortie par ce froid.
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En 2024, que chaque truite relâchée soit un espoir de préservation, et que chaque prise soit un hommage à la nature qui nous unit.
Sources et crédits de cet article :
- Fiche Sentier en France de la randonnée du sentier de Lagriffoul donne quelques informations sur la randonnée.
- La fédération de pêche du Tarn est accessible via ce lien : pechetarn.fr
- Infos pratiques pour pêcher dans le Tarn - Travelers and fish.

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