Ça y est. J’y suis. Voici le dernier article de ce voyage. Nous sommes le dimanche 18 mai lorsque je commence à l’écrire. La nuit a été difficile, malgré le confort du Paradores de Ceuta. J’y reviendrai. Après avoir traversé la Méditerranée, me voilà sur ce rocher singulier qu’est Gibraltar, dernière terre de l’Europe occidentale tournée vers le sud. Pourtant, ce n’est pas Gibraltar que j’ai choisi d’immortaliser en première photo. Non, cette première image est dédiée à Ronda, à son pont majestueux reliant la vieille ville à la nouvelle, et à l’émerveillement qu’elle m’a laissé entrevoir. Malheureusement, une fois de plus, ma rencontre avec Ronda s’est révélée incomplète.

Ronda

Bientôt, je remonterai vers le Nord, en diagonale vers l’Est, dans des lieux que je connais déjà et que j’ai décrits dans de précédents articles. Je serai donc plutôt discret sur cette partie du trajet. Rentrer au bercail après un si long voyage n’est jamais simple. Du moins, pour moi. J’en avais déjà parlé lors de mon retour après trois mois passés à l’Est en 2016, puis dans un billet dédié, quelques années plus tard. Ces cinq prochains jours seront l’occasion de dresser le bilan de cette virée marocaine et de préparer au mieux ma réintégration dans le monde.

Itinéraire Suivi : 


Itinéraire complet du voyage : 


Donc, pour revenir à ce dimanche 18 mai. Il est quatre heures du matin lorsque mes boyaux commencent à se tordre et que la Bérézina, comme on dit, se déclenche. À 10h30, je dois prendre le ferry pour Algesiras. À force de probiotiques et de Smecta, la tempête finit par s’apaiser vers 7h30. Sans prendre de petit-déjeuner, je file directement à l’embarcadère.

Heureusement, un ferry est là, prêt à partir. J’embarque sans encombre. En réalité, c’est comme prendre un bus : il suffit d’être autorisé à entrer dans le port maritime Pourtant, dans certains lieux, les compagnies exigent que les passagers arrivent deux à trois heures avant le départ. Une absurdité ? Une règle ? Dont la dépendance m'échappe. Baleària, la compagnie que j’ai choisie à l’aller comme au retour, prend soin de nos motos. À l’aller, deux sangles à l’avant, deux à l’arrière. Pour le retour, une seule, mais avec une mousse protectrice sur la selle. Un luxe que je n’avais pas eu en Corse.

Je trouve une place, stratégiquement située près des toilettes… Au cas où. Et, par précaution, j’ai subtilisé un rouleau de papier au Parador. Prévoyant le Babaz, dans sa douleur.


La traversée est paisible, aussi bien sur le détroit que pour moi. Mon trajet du jour ne compte que 140 km, mais dans mon état, il risque de me sembler bien plus long. Pourtant, je n’ai rien changé à mon itinéraire. À l’arrivée du bateau, j’ai deux heures d’avance, et ce n’est pas plus mal. Depuis Algesiras, je prends la direction de Gibraltar, le célèbre rocher britannique. C’est la première fois que je me retrouve à l’extrémité sud-ouest de l’Europe. Je suis venu ici par pure curiosité, après en avoir entendu parler dans des livres depuis longtemps. Il était temps que je le voie de mes propres yeux.

Une frontière se dresse, avec son lot de douaniers et de policiers espagnols, suivis de leurs homologues britanniques. Brexit oblige, j’imagine. Avant, cela ne devait sans doute pas être le cas. Les formalités franchies, une agréable surprise m’attend : ici, on roule à droite. C’est déjà ça !


Me voilà enfin à Gibraltar. Ce minuscule bout de terre où l’on parle anglais, sans doute teinté d’un accent espagnol, où les singes règnent en maîtres et où l’on traverse une piste d’atterrissage comme s’il s’agissait d’un simple passage piéton. Un lieu qui défie toute logique géographique et administrative, mais qui concentre en lui une singularité fascinante.

Une ville de 6,8 km², adossée à une montagne imposante, bordée d’une frontière internationale, de plages et d’un aéroport dont la piste coupe une avenue. Ici, la population jongle avec aisance entre la livre sterling et l’euro, sans jamais perdre le nord… ou le sud, selon d’où l’on regarde. On dirait que quelqu’un a pris une carte, a fermé les yeux et s’est dit : « Tiens, on va mettre un peu de tout ici, juste pour voir si ça tient. »

La grande vedette de Gibraltar, c’est bien sûr le Rocher. Monument naturel, symbole de résilience et surtout… terrain de jeu pour des centaines de macaques qui vivent en liberté et raflent tout ce qui leur semble digne d’intérêt. Je ne les verrai pas, bien sûr. Je ne fais que passer quelques dizaines de minutes ici.

Finalement, Gibraltar est un paradoxe ambulant, un territoire où l’histoire, l’humour et l’absurde coexistent avec une harmonie déconcertante.


Cette enclave britannique en territoire espagnol me rappelle forcément les deux enclaves espagnoles en terre marocaine, là même où j’ai pris mes bateaux. Après quelques recherches, il s’avère que le conflit entre Britanniques et Espagnols à propos de Gibraltar est bien réel… Comme celui entre l'Espagne et le Maroc... 

Cette querelle historique dure depuis plus de trois siècles. Situé à l’extrémité sud de la péninsule ibérique, Gibraltar est un territoire britannique d’outre-mer depuis 1713, lorsque l’Espagne l’a cédé à la Grande-Bretagne par le traité d’Utrecht, à la suite de la guerre de Succession d’Espagne. Cependant, l’Espagne n’a jamais réellement accepté cette perte et réclame depuis longtemps la restitution du territoire, comme le Maroc le fait avec Melilla et Ceuta. De son côté, Gibraltar a toujours affirmé son attachement à la souveraineté britannique. À plusieurs reprises, notamment lors des référendums de 1967 et 2002, les habitants ont massivement rejeté l’idée de passer sous contrôle espagnol.

La dispute a connu des pics de tension, notamment lorsque l’Espagne a tenté d’isoler Gibraltar par des restrictions frontalières et économiques. Aujourd’hui, bien que ces tensions se soient apaisées, la question de Gibraltar demeure un point délicat dans les relations diplomatiques entre Londres et Madrid. Plus qu’un simple territoire, Gibraltar est devenu un symbole d’identité, un attachement à une nation, et une source de débats qui semblent éternels. Un conflit entre deux rois, maintenant. Comme pour le Maroc et l'Espagne. Peut-être, faudrait-il mélanger le jeu de cartes ? 

Pour explorer Gibraltar, j’adopte le même principe que celui de Fès (voir article 6 - Le Kif du Rif). A savoir, un tracé préétabli pour en faire le tour complet. Je prends Europa Road puis Advance Europa Road, qui passe à travers le Rocher. Comme je ne peux rien avaler, je ne m’arrête même pas pour boire quelque chose.

Après environ quarante minutes, je reprends la route, direction le cœur de l’Andalousie, plein nord. De toute façon, impossible d’aller ailleurs. Je suis sur la A-405, une route provinciale. Pour une fois, je ne roule pas seul : il y a du monde, et beaucoup de motards. Certains, comme moi, en trail ; d’autres, en combinaisons de cuir, collés à leurs réservoirs, épousant les courbes de la route sous les rugissements de leurs moteurs. Les premiers te saluent, les seconds, trop concentrés sur leurs trajectoires, n’en ont pas le loisir. Mais parfois, l’un d’eux fait un appel de phare. Un signe furtif, mais suffisant pour sentir cette connexion invisible entre motards.


De mon côté, je garde les yeux rivés sur la ligne médiane. Mon allure reste mesurée, car à mesure que les kilomètres s’accumulent, ma vigilance s’amenuise. Tous les 50 km, je m’arrête pour boire quelques gorgées d’eau, histoire de maintenir une hydratation correcte. Mais plus j’avance, plus chaque pause devient une épreuve. Descendre de la moto est une lutte, y remonter un défi. Chaque mouvement me demande un effort presque surhumain.

Heureusement, le paysage me distrait. Et quel paysage ! Je traverse le cœur vibrant de l’Andalousie, cette terre où les villages blancs s’accrochent aux montagnes, baignés de lumière.

Enfin, à 13h00, après 140 km qui m’ont semblé en faire 400, j’atteins Ronda. Le Parador qui m’attend devient, pour les heures à venir, un véritable havre.

Vue depuis le célèbre pont de Ronda - le Parador est à droite 

À la réception, je tombe sur une employée qui parle un français impeccable. Je lui confie mes mésaventures, et en quelques instants, elle me règle l’essentiel : un déjeuner à base de riz blanc et d’eau, ainsi que l’emplacement de ma chambre. Elle s’occupe du reste sans que j’aie besoin d’intervenir.

Ronda et moi avons déjà une histoire. En 2014, j’avais été contraint de m’y arrêter après une chute sur un chemin de terre, alors que je parcourais l’Andalousie par les pistes (voir cet article - A la découverte des Sierras Andalouses - Partie 11 (un jour clair, un jour plus sombre)). À l’époque, j’utilisais les célèbres road-books Vibraction de Philippe et Christine Rosa, des voisins presque. J’ai appris que Philippe nous a quittés. Repose en paix, Philippe.

À l’époque, Ronda n’était pour moi qu’un point sur une carte, un refuge proche de ma chute, avec un camping où je pouvais bricoler quelques réparations de fortune. Il me fallait aussi soigner mes contusions, claquages et hématomes. Je n’avais rien visité, pas même traversé la ville. Depuis, j’ai pris le temps de me renseigner et je sais maintenant que Ronda recèle un riche patrimoine et des paysages spectaculaires.

La sieste me permet de récupérer un peu. Pourtant, les tempêtes, pour parler poliment, ne sont pas totalement derrière moi. Enfin... Le terme est peut-être, mal à propos!! Je décide tout de même de partir en balade, à pied, dans la ville, avec une idée en tête : trouver une belle vue sur le pont, en descendant vers les jardins de Cuenca, que j’aperçois au loin. 

Le pont de Ronda entre vieille ville et ville nouvelle


À mesure que j’avance, je réalise qu’il faudrait au moins deux jours pour s’imprégner pleinement de ce lieu, de son atmosphère et de ses habitants. Un jour pour une randonnée dans la faille, un autre pour explorer la ville.

Ronda semble tout droit sortie d’un rêve. Accrochée aux falaises spectaculaires du Tajo de Ronda, elle offre des panoramas à couper le souffle, où l’histoire et la nature s’entrelacent harmonieusement.

J’imagine sans peine me perdre dans les ruelles pavées de son Casco Histórico, bordées de maisons blanches et de palais majestueux. Le Puente Nuevo, impressionnant pont de pierre suspendu au-dessus du ravin, me donne des frissons par sa hauteur vertigineuse et sa beauté saisissante. Chaque coin de rue dévoile un pan d’histoire, un éclat de mystère, un soupçon d’inspiration—celle qui a marqué Ernest Hemingway et Orson Welles qui en avait fait leur muse.

C’est une immersion totale dans l’âme andalouse, avec sa plaza de toros mythique, son artisanat local et sa gastronomie généreuse… Ouille, ouille, ça, je ne peux pas en profiter aujourd’hui. Ici, le temps semble ralentir, comme s’il voulait me faire comprendre que je manque quelque chose. Et en effet, au bout d’une heure de balade, l’épuisement me rattrape. Il faut rentrer à l’hôtel. Ronda, encore un rendez-vous manqué.

Lunid 19 mai, la nuit a été catastrophique. Pire que la précédente. Fièvre, délires… un combat visible et mal odorant s’est joué dans mon corps. Toujours incapable d’avaler quoi que ce soit au réveil. Normalement, mon itinéraire prévoit 430 km en 8 heures de route. Impossible d’y parvenir dans cet état. Je change les plans. Le GPS passe en mode voie directe et rapide vers Almagro : 400 km en 4h30. C’est dur. Mais j’y arrive. Cette villle, théatre de la rencontre d'Almagro aussi en 2014, au retour de l'Andalousie (voir A la découverte des Sierras Andalouses - Lost in La Mancha). 

Le repos de la sieste et la fin d'après-midi au Parador d'Almagro me permettent de prendre un peu de recul sur ce voyage. 

D'abord, je dois revenir sur le berger de Debdou, Abdelkader. Grâce à Hamza et à Meriem, la sœur d'Hamza, qui vit sur place au Maroc, je tente d'organiser une livraison de vêtements chauds et de matériaux pour la maison. En effet, quand j'y étais, j'ai vu le peu de fringues que chacun avait. J'ai vu que la porte de leur maison était en piteux état et qu'il y avait des fuites au niveau du toit. Nos principaux contacts sont le commandant de la gendarmerie royale de Debdou et le frère d'Abdelkader, Mohammed qui vit en Espagne. J'espère que les choses avanceront dans les jours à venir. 

Le Maroc est un pays de contrastes et de générosités, c'est indéniable. Les kilomètres parcourus m'ont permis d'en découvrir diverses facettes et de faire de belles rencontres humaines. Je mets à part le fait que, maintenant je suis à moitié marocain par ma fille. Cette nouvelle famille est assurément formidable et les relations à venir ne sauraient être concernées par ce que j’écris ci-après. 

Pour autant, un des points qui m'a le plus gêné durant la partie marocaine est le manque d'hygiène et les risques sanitaires associés. Je suis soulagé de ne plus devoir me laver les dents à l'eau minérale ou ne boire que cela. Malgré toutes mes précautions de voyageur aguerris, j'ai été rattrapé par la patrouille. Deux fois. La seconde a été plus sérieuse. À mon retour, je vais consulter, histoire d’être sûr qu’aucune bactérie ne s’est cachée quelque part. Ma fille dit souvent que la chaîne du froid n’est pas la même au Maroc qu’en France et en Europe. Je ne peux que confirmer… Le deuxième point est inhérent à l'absence de place faite aux femmes dans l'espace public. Je n'y arrive pas. Les femmes n'existent pas, visuellement, en dehors des cercles privés. J'avais fait le même constat après mon voyage en Iran, en 2019. A l'époque, j'avais indiqué faire une pause avec les voyages dans les pays musulmans. Le troisième point est le manque d'aspects festifs. Sortir le soir n'a aucun intérêt, sauf si c'est pour une soirée privée. Pour toutes ces raisons, je n’envisage pas d’y retourner à moto et seul. Je ne ferai plus de voyage en solo, à moto, dans un pays musulman.

Je m’interroge sur la volonté politique de faire évoluer les choses. Est-ce une réalité ? Souhaitent-ils conserver les couches sociales existantes ? La salubrité des villes et l’hygiène publique nécessitent des réformes et des impôts. Qui peut les payer ? J’ai traversé des lieux où les conditions rappelaient celles de la France des années 50. Puis, à Ifrane ou près de Ceuta, tout bascule : grandes villas derrière d’immenses enceintes, aucun souci d’hygiène ou d’assainissement. Pourquoi ?
L’urbanisation est accélérée (des programmes de construction partout), ce qui engendre une croissance des besoins en services publics. Est-elle maîtrisée ? Les villes se densifient, donc la production de déchets et la pression sur les systèmes d’assainissement augmentent. Des solutions sont-elles envisagées ?

La France aussi a connu ces défis lors de son industrialisation et son urbanisation rapide dans les années 50. Pendant longtemps, la pollution et l’assainissement ont été négligés. Il a fallu du temps et une prise de conscience collective pour voir des réformes émerger. Mais aujourd’hui, en 2025, sommes-nous allés trop loin dans la régulation et la normalisation ? Le gouvernement considère-t-il que les pauvres (ceux qui n’ont pas les moyens d’acheter une voiture électrique, dont on ne saura que faire des batteries plus tard...) doivent se déplacer en charrette à cheval pour pénétrer les zones à ZFE ? La disparition des couches les plus pauvres de la société française est-elle un fait ou une illusion politique ? Tout dépendra de celui qui voudra répondre et du discours qu’il choisira d’adopter. Et pourtant, bordel, la politique, c’est l’essence de la vie en société. Je m’emballe peut-être… Babaz, c’est l’heure de ton traitement contre l’hypertension.

Ceci étant écrit, je ne regrette ni le voyage, ni la durée, ni ce qui s’y est passé, ni les choix faits. Il me fallait ces conditions pour en prendre la bonne mesure. 

Le soir venu, je ne peux toujours pas dîner normalement. La tempête est là, sournoise, prête à frapper au pire moment. Une fois de plus, je me contente d’un simple riz blanc à la cafétéria. Les autres convives, comme le personnel, affichent une mine contrite en voyant mon dîner austère. Ce soir, je commence les antibiotiques que j’ai dans ma pharmacie. Et pour compléter, j’ai renouvelé mon stock de probiotiques (pro-bióticos en espagnol).

Mardi 20 mai, La nuit a été plutôt calme. Les crises se sont espacées, et j’ai enfin pu dormir, par intermittence. Au réveil, un petit déjeuner léger. Un comble, quand on séjourne dans un parador… Mais c’est mon premier en trois jours, alors je savoure mes deux tranches de pain beurrées, le café, et la tranche de jambon. Je ne suis pas au sommet de ma forme, mais la fatigue recule. Je décide de suivre le tracé original, du moins pour le début.

L’itinéraire me conduit en terre aragonaise, à Teruel. Sur la route, le plaisir de rouler revient peu à peu, porté par la beauté des paysages. Le parcours prévoit 434 kilomètres en six heures. Je décide finalement d’écourter la fin, restant sur la nationale au lieu d’emprunter les routes secondaires. La fatigue s’annonce.

Et me voilà à Teruel, une ville que je connais déjà pour y avoir fait une étape d’une nuit, il y a quelques années. Je m’étais promis d’y revenir, cette fois pour prendre le temps de visiter. Je retrouve le même hôtel, au bord de la vieille ville. Pour le dîner, je pars en quête d’un plat compatible avec mon état, encore un peu incertain.

Vue depuis ma chambre sur l’escalier monumental de Teruel

Mercredi 21 mai, encore une nouvelle nuit chaotique. Les crises ont repris, cette fois sans la fièvre. J’ai réussi à dormir trois heures au petit matin. Au réveil, j’apprends que Murielle m’a pris rendez-vous avec mon médecin pour mon retour. Elle me conseille aussi de chercher de l’argile verte en pharmacie.

Je prends tout de même un petit déjeuner léger, et vers 11h00, je pars explorer la ville.

Teruel, capitale de la province du même nom en Aragon, est une ville discrète mais pleine de charme, où l’histoire, l’architecture et la gastronomie (encore une fois…) s’entrelacent pour offrir une expérience unique. Souvent qualifiée de « la grande oubliée » de l’Espagne, elle mérite pourtant toute l’attention des amateurs de culture et de patrimoine.

Teruel est mondialement reconnue pour son architecture mudéjare, un style unique qui mêle influences chrétiennes et musulmanes. Ses édifices, dont la cathédrale de Santa María et les tours San Pedro, San Martín et El Salvador, sont inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO. Avec leurs mosaïques de briques et de céramiques, ces monuments témoignent du riche passé culturel et artistique de la ville. Je trouve ces édifices d’une beauté incroyable. 

Le magnifique escalier monumental n'est pas classé, lui. En effet, celui-ci a été construit en 1921 avec pour objectif de ressembler le plus possible au style Mudéjar des édifices classés de Teruel. Ce qui est une belle réussite. Ma balade commence en haut de cet escalier. 

Escalier monumental 

L’escalier sous différents angles 

Teruel est aussi le théâtre de l’une des histoires d’amour les plus célèbres d’Espagne : la tragédie des Amants de Teruel. Cette légende médiévale raconte l’amour impossible entre Isabel de Segura et Juan Martínez de Marcilla, deux jeunes gens séparés par les différences sociales. Cette histoire dramatique, souvent comparée à celle de Roméo et Juliette, est célébrée chaque année lors d’un festival où la ville replonge dans l’ambiance du XIIIᵉ siècle avec des reconstitutions historiques et des spectacles.

Impossible d’évoquer Teruel sans parler de sa gastronomie, notamment son célèbre jambon de Teruel, à la texture délicate et à la saveur intense. Produit sous appellation d’origine protégée, il est un incontournable des tables aragonaises. On y déguste aussi la trufa negra (truffe noire), les fromages artisanaux et des plats typiques comme le ternasco (agneau rôti) et les migas aragonaises, une préparation rustique à base de pain émietté. Tout cela n’est malheureusement pas pour moi, pour cette fois. 

En haut à gauche : une des tours mudéjar - En haut à droite : la cathédrale - en bas : la Plaza del Torico

L’après-midi, je prends le temps de laver la moto. En inspectant les détails, je découvre qu’en plus d’une vis de bulle manquante, j’ai aussi perdu une vis du lèche-roue, et pire encore, l’une des trois pattes de fixation est cassée. Je pensais avoir emporté un stock de vis, mais impossible de remettre la main dessus dans le fouillis de mes valises et sacoches. Je perds la tête, je crois.

Je décide de chercher un magasin de moto. Il y en a un pas loin : Manimotos. À mon arrivée, David m’accueille. Je lui explique, via un traducteur, mes deux problèmes de vis. Il observe la moto, puis m’indique qu’il va fouiller au fond du magasin pour voir ce qu’il a. Quelques minutes plus tard, il revient avec un assortiment de vis et d’outils. Il passe 30 minutes à tester différentes options. Finalement, deux vis font l’affaire.

Je n’ai rien à payer.  « Service rendu entre motards, » me dit-il simplement. Merci David. Merci Manimotos.

David, son sourire et son efficacité

A 17h30, je pars à mon rendez-vous. Oui, mon rendez-vous à la pharmacie pour récupérer mon argile qui a fait l’objet d’une commande, ce matin quand j'y suis passé durant la balade. 

Jeudi 22 mai, L’argile trouvée la veille a fait son effet, combinée aux antibiotiques et aux probiotiques que je prends. Ça va mieux. Je suis reposé et les crises semblent derrière moi, enfin. Je n’ai pas encore remangé normalement… Peut-être ce soir ?

Je prends la route prévue, je m'approche d'Andorre. L’étape du jour m’emmène au Parador de La Seu d'Urgell après 437 kilomètres. Une belle étape. J’ai retrouvé la forme, alors tout va bien.

Finalement, la maladie m’a empêché de mettre à profit ces cinq derniers jours pour préparer mon retour, comme je l’indiquais au début de ce billet.

Vendredi 23 mai, dernière étape. Je suis parti par Andorre et je rentre par la merveilleuse N260, le village de Sort, le port de la Bonaigua à 2072 m, Baqueira et le val d’Aran puis le col de Saint Mende et celui de Portet-d'Aspet. Je suis heureux de rentrer, enfin. Cette fin de voyage aura été sacrément contrariée et n'a pas ressemblé à celle imaginée. 

La France est derrière la Montagne, Sort, le port de la Bonaigua et le Val d’Aran

Le totalisateur du compteur indique 6 873 kilomètres parcourus pour 45 jours de voyage. Les Heidenau K60 Scout ont fait leur job (sauf dans la boue...), ils ont 11 000 km et sont encore acceptés par la maréchaussée. 

Hier soir, Mohamed, le frère du berger Abdelkader, m’a envoyé une photo. À droite, on voit l’un des fils d’Abdelkader, Abdelkalk, monter sur ma moto, là où elle avait été laissée après ma débâcle.  À gauche, une photo prise par Abdelkader, envoyée à Hamza, mon gendre, pour le rassurer sur mon état, avant que je ne passe la nuit dans la bergerie.

J’ai envie que cette double photo soit la dernière de ce dernier article. Un retour au début du voyage, là où les rencontres ont commencé.  



Je dédie les septs articles consacrés à ce voyage  : 

- à Abdelkader, le berger de Debdou qui m'a sauvé, et à toute sa famille composée de Abdelkalk, El Alía, Lahbib, Khadija, Kawatr, Rahma, Maimouna , Fouzia, Ossama, Ajouuja et Mohammed son frère qui vit en Espagne. 
- à Mourad le cireur de chaussures de Khenifra.
- au vieux monsieur qui était en haut de la route où le tremblement de terre de 2023 a eu lieu. 
- à Mme Arlette.
- à tous les amis et amies de Natacha et Hamza.
- à ma nouvelle famille marocaine, Latifa, Abdelkrim et Meriem.
- à Natacha, ma fille et à Hamza, mon nouveau fils pour toutes les dingueries qu'ils ont imaginées pour leur mariage. 

Sources et crédits de cet article :

- article de Point de vue sur Gibraltar, le rocher de la discorde.

- Un billet de Novo Monde sur Ronda : Visiter Ronda en Andalousie. 

- Quelques éléments glanés sur la politique marocaine en matière d'urbanisme et d'assainissement via divers sites publics et indépendants. 

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